21 juin 2015
Lettre ouverte à Guillaume Decitre
Cette année les écoles primaires de la ville d'Aix-les-Bains achèteront leurs livres auprès de la librairie DECITRE et non plus auprès d'une librairie aixoise.
Nous reproduisons ci-dessous le courrier que nous avons adressé à Guillaume DECITRE, président du groupe DECITRE, pour l'alerter sur les problèmes que cele pose et posera dans un proche avenir.
Librairie des Danaïdes
9, rue de Chambéry
73100 AIX LES BAINS
04 79 61 10 41
contact@librairie-danaides.com
Aix les Bains, le 15/05/15
Bonjour,
Nous sommes tout à fait désolés que vous ayez emporté le marché scolaire des écoles de la ville d’Aix les Bains. Ce marché représentait pour nous un chiffre d’affaires important, et même si notre marge était assez faible, il était nécessaire à notre bon fonctionnement. C’est financièrement important pour nous mais ce n’est pas uniquement financier. Le comprenez-vous ? Dans des villes dont la périphérie se développe à grande allure, où les zones commerciales s’épanouissent et où il est difficile d’échapper en centre-ville à la fade litanie des pharmacies – banques – agences immobilières et autres opticiens, il est important de se battre pour conserver des commerces vivants. Et pour cela il est important que de tels marchés ne nous échappent pas.
Alors qu’aujourd’hui se profile l’union entre les régions Rhône-Alpes et Auvergne, alors que l’on parle du possible abandon de la carte M’RA, vous devez vous frotter les mains : encore des marchés à prendre ! Avec 400 000 € de chiffre d’affaires, nous payons trois personnes à plein temps. Et vous, quel est le ratio ? La perte de nos marchés scolaires signifiera pour nous le licenciement d’au moins une personne. Et nous n’embaucherons personne pendant l’été pour nous aider comme nous le faisions chaque année. Combien vous faudra-t-il en embaucher pour compenser ce que vous ferez perdre aux librairies de la région ? Je doute que ce solde soit en faveur de l’emploi dans ma ville et je doute même qu’il le soit au niveau de la région. Et pourtant…
Vous vous êtes engagé dans une spirale où vous devez phagocyter un maximum de marchés pour un minimum de coûts, où une dizaine d’écoles pour vous ne représente rien ou pas grand-chose. Nous connaissons les institutrices et instituteurs de ces établissements, nous discutons avec eux, nous connaissons les quartiers où se situent ces écoles aussi. Nous avons un magasin en centre-ville où l’on peut se rendre, faire un choix sur place, se renseigner… Nous embauchons du monde, nous créons de l’animation, c’est important pour la ville. Et vous arrivez, vous terrorisez tout le monde avec votre service juridique et vos gros bras, faîtes fi de la vie locale et proposez votre interface électronique pour remplacer mail/coup de fil/échanges de vive voix et rapport humain en général. Belle évolution. Beau service que vous rendez là à notre société.
Quand votre faim aura poussé notre librairie et cent autres à péricliter sur notre territoire, nos clients n’auront sans doute plus qu’à se tourner vers votre site internet ou celui de notre concurrent commun ? Et bien lorsque l’ensemble des commerces de proximité cessera d’exister à cause d’entreprises menant des stratégies telles que la vôtre, les centres-villes seront bien tristes et notre cœur bien lourd. Où vous arrêterez-vous, quand vous rendrez-vous compte que derrière vos chiffres de croissance il y a un monde qui vit, des gens qui se parlent ? Pourquoi toujours et sans cesse conquérir des marchés ? Si c’était au nom du bien commun que votre concurrence s’exerçait je comprendrais. Mais là… Vous allez faire économiser à la commune 1000 € par an ? 100 € par école ? Demandez donc aux enseignant(e)s si le jeu en vaut la chandelle… Ce que vous allez faire économiser à la commune c’est de l’argent que nous, gérants de la librairie, dépensions dans les commerces ou entreprises de la ville, sur le marché, en activités pour nos enfants ou en bières aux terrasses des cafés. Et que nous ne dépenserons plus puisque nous n’avons plus cet argent. Demandez donc maintenant à tous ces gens si le jeu en vaut la chandelle…
Je vous enjoins de faire attention à cette stratégie du plus faible coût, du nivellement par le bas. Vous trouverez toujours une entreprise pour « rentabiliser » mieux que vous encore, pour proposer moins. Par contre, un meilleur service, une présence, une attention ?
A bientôt peut-être.
Romain et Bénédicte CABANE
12:11 Publié dans Actualité de la librairie | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
et la ville d'aix-les-bains, elle fait quoi pour sauver ses commerces ? d'autres villes parviennent à garder les marchés publics pour leurs entreprises locales, pourquoi pas eux ? Je suis de tout coeur avec vous mais des voraces il y en aura toujours. Les responsables ce sont ceux qui cèdent à leurs sirènes
une libraire encore à l'abri (mais pour combien de temps ?)
Écrit par : claire | 15 juin 2015
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